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PORTRAIT D'ALUMNI : NATHALIE BENDAHAN, ISG PROMO 88 , PROCESS OPTIMIZATION & SAP PROJECT DIRECTOR @L'OCCITANE EN PROVENCE : UNE CARRIERE INTERNATIONALE ET TOUJOURS TOURNEE VERS DE NOUVEAUX CHALLENGES !

01 février 2024 Association
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Florence Delsaux : Bonjour Nathalie, Tout d'abord, je vais te demander de me parler de ton parcours depuis que tu es sortie de l'ISG ?


Nathalie Bendahan : Bonjour Florence, j'ai commencé, en fait, en agences de communication. Je suis d’abord allée chez Publicis, puis après dans le groupe Havas, et ensuite chez McCann dans ce qu'on appellerait aujourd'hui, des agences de digital et CRM. J’ai donc passé à peu près 15 ans dans le conseil en communication.


Puis en 2001, j’ai intégré L'Occitane ; cela fait donc maintenant 22 ans. On ne s'ennuie jamais à L'Occitane et je n’ai pas l'impression d'y être depuis si longtemps ! J'ai d'abord été recrutée chez eux pour mon expérience du CRM et du digital. J’ai donc intégré L'Occitane au Markéting International au siège de Paris, pour mettre en place le premier site internet de L'Occitane et pour initier le CRM. J’ai ainsi défini la stratégie de recrutement de nos clients, de segmentation de la base de données, d’animation de notre communauté de clients, etc. De 2001 à 2004, j’ai déployé cette stratégie dans plusieurs pays: US, Hong Kong et France, basée à Paris.
En 2005, pour des raisons personnelles, je suis partie m'installer à Londres pour rejoindre mon mari. A ce moment-là, j'ai été ‘récupérée’ par la filiale UK de L'Occitane, pour prendre la direction marketing de la Filiale UK. Là, mon périmètre était focalisé sur le marché UK et couvrait non seulement le CRM et le digital, mais également tout le marketing de la filiale (animation de nos points de vente, outils promotionnels, vitrines…). J’ai été directrice marketing de 2005 à 2010.


En 2010, le groupe, donc l'international, m’a proposé de m'occuper d'un énorme projet autour de la refonte de nos processus logistiques et finances monde. Cela impliquait un changement d’ERP, et un passage sur un outil qui s’appelle SAP. Je me suis demandé si les dirigeants du Groupe s'étaient trompé de casting. J’étais experte en marketing et ne connaissais rien à la finance et ni à la Supply Chain ! Mais non, le PDG, très visionnaire voulait vraiment que ce soit quelqu’un avec un œil neuf, pour justement ne pas remettre en place ce qu'on a aujourd'hui et essayer de l'améliorer. Dans ce sens, ma connaissance du siège et d’une filiale de distribution et du comportement des consommateurs, étaient ce qu’il recherchait. Ce qui est formidable avec L'Occitane, c'est qui il y a des passerelles comme ça qui s'ouvrent à toi. Bien sûr, la finance et la logistique étaient tout de même très loin de mon univers et j'ai énormément souffert au début. Je ne comprenais rien à rien (rires !) mais bon je me suis accrochée et puis voilà. J'ai fini par comprendre et à apporter ma pierre à l'édifice. Ce projet a été assez long, j’ai mis en place SAP et ses nouveaux process dans toutes nos filiales jusqu’en 2017 : France, Europe, USA, Japon, Chine, Brésil, Hong Kong, Singapour. Toujours basée au UK, mais avec énormément de déplacement dans toutes nos filiales.
Je ne suis plus jamais revenue au marketing. Je me suis dit que j’avais encore beaucoup à apprendre là où j’étais et puis l’international c’est passionnant.
Je suis par conséquent restée dans cette équipe.

Aujourd’hui, depuis début 2023, j'ai un nouveau projet. On fait évoluer l’outil informatique pour la supply chain, la Production Industrielle et la Finance. Et on m'a confié la direction de cet énorme projet qui implique à peu près 175 personnes dans tous les pays aussi avec une échéance impérative au 1er juillet 2024. C’est un beau challenge et c’est un projet très stratégique pour le Groupe. Franchement, je ne regrette pas du tout de pas être revenue au marketing et j’adore de ce je fais. Voilà donc mon parcours.

 

 

FD : Alors justement ça m’amène à la question suivante. Qu'est-ce qui te motive dans tout ça ?


NB : En fait, ce qui me motive toujours dans la vie, c'est la nouveauté, le changement. J'ai besoin d'apprendre, j'ai besoin de toujours réfléchir. En fait, c'est ça qui m'intéresse le plus. J’ai besoin d'avoir ça tout le temps. Bizarrement, bien que je sois à L'Occitane depuis 2001, L'Occitane m'a toujours offert cette nouveauté, ces challenges, ces défis. J’apprends tous les jours des nouvelles choses techniques ou des nouvelles choses humaines. Je travaille chaque jour avec des gens différents. Je suis allée travailler au Brésil, j'ai dû travailler des gens qui ne savaient pas lire et écrire. Ça fait bizarre, mais finalement c'est très formateur. Cela t’oblige à t'exprimer simplement, à mettre à leur disposition des façons de faire différentes, plus visuelles. En fait, ca nous rend plus humble.

 

 

FD : Puisque tu es amenée à travailler avec différents marchés, on sait que, à chaque marché, son langage, à chaque marché sa stratégie. Quels sont pour toi les clivages les plus importants entre le fait d'être basée à Londres et de devoir travailler avec le monde entier. Quels sont les pays avec lesquels tu as le plus de changement de business étiquette ?

 

NB : C’est clairement avec l'Asie. Ce clivage, on peut le réduire par la présence physique, parce qu'on peut voir les gens. Il y a quand même quelque chose qui s'instaure avec la présence physique que tu n'as pas quand tu es à distance. De plus, avec l'Asie, c'est toujours un peu plus difficile parce qu’il y a aussi une barrière de langue évidente. Et souvent les Asiatiques te disent oui, mais ne le feront pas. On sait qu'un ‘oui’ asiatique ce n’est pas pareil qu'un ‘oui’ italien. En conclusion, je dirais que le clivage est donc physique et culturel. Que ce soient les Asiatiques ou les autres, des fossés se créent progressivement, de fait, parce que tu ne les vois pas tous les jours. Et parce que l’on partage moins, il arrive parfois que choses se mettent en place sur certains marchés qui ne plaisent pas au Central et on est obligé de composer.

 

 

FD : Donc dans le marché asiatique pour toi ce serait le pays le plus compliqué à travailler ?


NB : Je dirais particulièrement les Japonais, c'est vraiment un monde à part. Même si tu parles anglais, eux ne le parlent pas forcément. Dans toute l'Asie, c'est vraiment le pays le plus atypique et probablement parmi les moins collaboratifs. C'est sans doute le côté insulaire, un peu comme l'Angleterre. Les pays insulaires sont toujours beaucoup plus compliqués à travailler parce qu’ils restent sur quant-à-soi, leurs coutumes, leurs traditions. En même temps, c’est eux qui savent mieux que nous les habitudes de leurs marchés et de leurs clients. Il faut aussi savoir les laisser faire. La preuve, à L’Occitane, le Japon est quand même très leader sur l'Asie.

 

 

FD : Je vais arriver à une autre question aujourd'hui pour toi, justement, on parlait du COVID, il y a eu beaucoup de changements avec le COVID sur la fréquentation des boutiques, sur le développement des ouvertures de boutiques. On voit qu'en Asie, il y a beaucoup plus de boutiques qui s'ouvrent. Avant, c’étaient les Asiatiques qui venaient sur le marché européen pour acheter, pour consommer. Alors je le vois surtout dans les marques de luxe, est-ce que c'est quelque chose qui s'applique aussi chez l'occitane ? Est-ce que les produits que vous développez sont différents en fonction des marchés ? Parce que toutes les attentes ne sont pas les mêmes sur les marchés, les consommateurs n'ont pas les mêmes besoins. Est-ce que c'est quelque chose que tu te dis au quotidien ?

 

NB : Il y a plusieurs questions là. Mais oui, à L’Occitane, les marchés qui aujourd'hui sont en croissance, c'est évidemment les marchés asiatiques. Le Japon a été longtemps notre premier marché. Aujourd’hui, ça ralentit et se sont plutôt la Chine, la Corée, Taïwan qui portent la croissance de L'Occitane. On a des pays aussi comme le Brésil, aussi, qui progressent fortement. En Europe, aux États-Unis, on est face à des pays plus mûrs et les croissances ne sont plus aussi fortes. On ouvre moins de boutiques, on joue sur le clienteling et le digital pour se développer. Donc oui on a ce phénomène ‘post COVID’ bien entendu. Pour ce qui est des gammes différenciées par région, en revanche, l’Occitane a toujours voulu proposer une gamme homogène et on n'a jamais développé de produits spécifiques pour des marchés.

 

 

FD : D'accord, et alors par exemple, dans une des boutiques L'Occitane à Paris, il y a un concept avec Hermé, est-ce que c'est quelque chose que vous développez dans d'autres pays d'avoir justement cette alliance parfum, ambiance olfactive, avec quelque chose de gustatif, c'est quelque chose que vous développez ailleurs ou est ce que c'est vraiment quelque chose de spécifique à la France ?

 

NB : C'était une opportunité, on l'a fait. On l'a fait au UK aussi avec Pierre Hermé, ça n'a pas marché, donc on a arrêté. En fait, ce sont des partenariats qu'on fait par opportunités. Au Brésil par exemple, on a, il y a quelques années, créé un espace qui associait une boutique L’Occitane, un restaurant gastro et un SPA. Donc c'était un peu un lieu où les clients pouvaient venir passer la journée.
Ce genre de projets sont plutôt laissés à l'initiative de chaque pays. On tente des choses, si ça marche, on continue. Si ça devient compliqué, on arrête. Au Japon, on avait un moment le café L'Occitane, qui a bien fonctionné durant 5, 6 ans. Et puis, avec le COVID, ça s'est arrêté, ça n'a pas repris depuis.
On a des filiales dans des pays dont on estime qu'elles connaissent mieux leur marché que nous bien sûr, donc les PDG de filiales locales ont la liberté pour développer leurs initiatives. La seule chose qu'on impose c’est la gamme de produits et les concepts de magasins. Mais, pour ce qui relève de l'animation, des partenariats locaux, il y a un petit circuit de validation par les équipes centrales pour sécuriser le respect de notre image, on laisse de la liberté à nos filiales.

 

 

FD : J’aimerais échanger avec toi sur l’engagement RSE,  L'Occitane travaille avec des essences olfactives, au niveau de l'engagement d'économie durable, d'empreinte carbone, et cetera, est ce que vous produisez sur place, ou est-ce que vous exportez ?

 

NB : L’Occitane a obtenu la certification B Corp. Ceci démontre notre engagement dans ce domaine. La certification B Corp est très exigeante : les critères d'admission sont autour de la RSE, de l'économie durable et empreinte carbone. Il faut produire des rapports chaque année pour maintenir le statut B Corp. Cela répond en partie à ta question.


L'usine de L’Occitane est basée à Manosque dans le sud de la France, et donc on essaie d'utiliser le plus possible d'utiliser des essences ou des huiles essentielles qui proviennent de producteurs locaux ou du bassin méditerranéen. Bien sûr, le beurre de karité vient d'Afrique, mais L’Occitane porte l’engagement de faire travailler exclusivement des villages de femmes. On les soutient, on crée des écoles pour scolariser les jeunes filles dans ces villages par exemple.
Dernière chose, tu m'as demandé, où est-ce que L’Occitane produit ? Tout est produit à l’usine de Manosque, en Provence. Puis, nous exportons vers les entrepôts de nos filiales, lesquels redistribuent localement avec moins de CO2. En conclusion, tout est fait à Manosque et est ‘made in France’. Exception faite, au Brésil où nous avons une gamme qui s'appelle L'Occitane au Brésil, très chouette, joyeuse et fun, avec des ingrédients brésiliens (maracuja, mandacarau) et commercialisés uniquement au Brésil, pour une clientèle plus jeune.

 

 

FD : D'accord en termes de prix, est-ce que vous avez un alignement prix pour tous les pays où vous adaptez au marché local ?

 

NB : Nous donnons des guidelines à nos filiales. Mais nous laissons toujours le dernier mot à la filiale. En Asie, les produits sont très chers et au UK c'est cher aussi. En France, c’est plus abordable. Cependant, la volonté est d’aller vers un positionnement de luxe. Les prix vont peu à peu augmenter, même en France.

 

 

FD : J'ai 2 dernières questions si tu avais un conseil à donner à des étudiants qui ont envie de travailler sur ce secteur là ou qui ont envie de travailler dans ces pays-là, quels seraient tes conseils ?

 

NB : Personnellement, j’ai toujours trouvé difficile d'aller travailler dans un pays sans avoir eu déjà préalablement une expérience dans son propre pays. Pour être choisi, il faut apporter une véritable valeur ajoutée professionnelle, au-delà de sa culture. Et ce n’est pas facile en fait. Pas facile si on n'a pas déjà un bagage ou si on ne vient pas d'un siège français. Une autre option, c’est faire des stages à l'étranger. C’est une autre porte d'entrée, arriver via un stage et de le prolonger après. aujourd’hui, il y a le stage et le VIE qui permettent d'avoir un pied à l’étrier dans une entreprise qui correspond en gros à une période d'essai.


En bref, pour moi, soit on est déjà dans le pays où on veut travailler, soit on fait valoir une solide expérience en France et qu'on peut revendre ailleurs. Et puis évidemment, la plupart du temps, il faut quand même parler la langue. Pour travailler au Japon sans parler le japonais, c’est quasi impossible. Certaines fois, l’anglais suffit (comme en Thaïlande, à Hong Kong) mais au Japon, ce n’est pas pareil.

 

 

FD : Est-ce que tu aurais un souvenir de l’ISG que tu aimerais partager avec nous ?


NB : J'ai fait le cycle international CM. On partait des États-Unis pour aller au Japon et on s'est arrêté à Hawaï, à mi-chemin. Ce petit séjour à Hawaï était franchement mémorable. Nous étions une douzaine je crois. On était étudiant, on n'avait pas un sou et on a fait des trucs insensés. On allait manger dans des restaurants buffet et on prenait une table pour 4 alors qu’on était 12. Et une fois que l’un d’entre nous avait terminé, il sortait du restaurant, et un autre prenait sa place à table. C’était vraiment drôle. On dormait sur la plage parce qu’on n’avait pas les moyens de se payer un hôtel, on était en petites cuillères les uns contre les autres tellement il faisait froid. Une nuit, nous sommes quand même allés à l'hôtel pour avoir un peu de confort. Alors, 2 d'entre nous sont allés faire le petit couple pour prendre une chambre. Mais en fait on a dormi à 12 dans la chambre. Nous étions dans le lit, par terre, dans la salle de bain. C'est un super souvenir !!!!

 

Merci Nathalie ! 

Florence 




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